Même s'il n'est pas né dans le Jura, il
passera sa vie à Villers-Robert dès l'âge de deux ans.
Il suivra une scolarité assez bonne, à l'école du
village, au collège de l'Arc à Dole, au lycée Victor
Hugo à Besançon et des études de médecine à Paris (très
vite arrêtées).
De retour dans le Jura, il commence l'écriture avec son premier livre qui
sortira en 1926 sous le titre de " Brûlebois ".
Il restera toute sa vie très attaché à sa région et dans ses romans, il
fera une place de choix à la Franche-Comté avec en
particulier " la Vouivre " qui reste encore
aujourd'hui un roman essentiel dans sa carrière.
Il écrira 17 romans, des dizaines de
nouvelles et de pièces de théâtre.
Il écrira également de nombreux scénarios et adaptera
d'après des traductions des auteurs américains comme
Arthur Miller ou Tennessee Williams.
De nombreux films, téléfilms et dessins-animés seront
tirés de ses livres.
Ecrivain politiquement marginal, très à
l'écart des milieux intellectuels, il sera classé à
gauche, puis de droite et enfin anarchiste de droite.
Ecrivain, nouvelliste, scénariste et
essayiste, sans oublier ses activités de journaliste,
Marcel Aymé reste aujourd'hui l'un des auteurs français
les plus lu en France.
***
L'écrivain a été attaqué par tous ceux
qui ne supportaient pas la description crue dans les
romans de la France des années 1940 et celle de
l'épuration, mettant sur le même pied les collaborateurs
monstrueux et les revanchards sinistres, dépeignant avec
une exactitude désinvolte le marché noir, les
dénonciations, les règlements de comptes (Uranus, Le
Chemin des écoliers). Mais
il a surtout soutenu jusqu'au bout Robert
Brasillach, tentant de faire
signer à des intellectuels et des artistes de tout bord
la pétition contre la peine de
mort dont Brasillach était frappé. Albert
Camus, Jean
Cocteau, François
Mauriac et d'autres l'ont
signée, sauf Picasso qui venait d'adhérer depuis peu au
parti communiste, ainsi que l'explique Claude
Roy : « J'ai
souffert que mon parti d'alors s'oppose à ce que je
participe à une demande de grâce. Picasso a refusé aussi
pour la même raison. » Il a également collaboré à Défense
de l'Occident, périodique
nationaliste.
En , il est cosignataire d'une lettre du Comité
de secours aux objecteurs
de conscience réclamant au
Président de la République et au Premier ministre un
statut pour que les objecteurs puissent effectuer un
service civil et non militaire.
Bien que très blessé par cet épisode, Marcel Aymé n'en
continue pas moins à publier un grand nombre de romans,
de contes, de nouvelles et de pièces de théâtre. Si ses
œuvres lui valent un immense succès populaire, la
critique le met en pièces ou l'ignore, et cela jusqu'à
sa mort en 1967. Champion du contre-courant, on lui
reproche l'anti-américanisme de La
Mouche bleue, en
pleine période pro-américaine.
À propos de sa pièce Les
Oiseaux de lune, mise en
scène par André
Barsacq au Théâtre
de l'Atelier, Elsa
Triolet écrit : « On rit
énormément à ces oiseaux de lune. Mais hier comme
aujourd'hui, qu'on pleure ou qu'on rie, il y a quelque
chose de pourri dans ce royaume-là. » Et
pourtant, au théâtre, Marcel Aymé obtient de grands
succès en particulier avec La
Tête des autres, mise en
scène par André
Barsacq au théâtre
de l'Atelier, une satire dont
la magistrature est
seule à ne pas rire.
La Tête des
autres est le premier
grand plaidoyer contre la peine
de mort qui fait scandale.
Marcel Aymé y ridiculise les procureurs de la
République.
Son frère aîné, Georges
Aymé, est général de brigade
durant la Seconde Guerre mondiale, et décoré de l'ordre
de la Francisque. Il est
également le second du général Eugène
Mordant, commandant des forces
françaises en Indochine, et son principal collaborateur
à la tête de la Résistance indochinoise.
Georges épouse en 1931 Alix
Hava, artiste peintre et
professeure à l'école
des beaux-arts du Viêt Nam.
Le 16 avril 1931, Marcel Aymé a épousé Marie-Antoinette Arnaud.
Le style de Marcel Aymé analyse avec esprit les travers de l'homme et de
la société. Sa vision peut être noire. L’hypocrisie,
l'avidité, la violence, l'injustice, le mépris,
apparaissent dans ses ouvrages, aussi bien que la
camaraderie, l'amitié, la bonté, l'indulgence et le
dévouement. Il mêle une description réaliste de la
société à des éléments de fantastique. Ce fantastique,
loin d'être traditionnel, est teinté d'ironie et peut
être qualifié de « fantastique ludique » (cf. le
recueil Le
Passe-muraille).
Le fantastique de Marcel Aymé :
Il ne propose aucune hésitation
entre deux interprétations, l'une rationnelle, l'autre
surnaturelle (selon le schéma de Todorov ,
qui s'appuie sur le fantastique de Maupassant) ; ce
n'est pas non plus l'intrusion du mystère dans le cadre
du quotidien selon la définition de P.-G.
Castex, dans la mesure où il
n'introduit pas souvent une atmosphère de cauchemar.
Les histoires fantastiques de Marcel Aymé sont souvent fondées sur
l'irruption, dans la vie d'un homme souvent peu enclin à
chercher l'aventure, d'une entorse majeure aux lois
physiques les plus inébranlables, qui transforme son
existence, mais dont l'origine n'est presque pas
envisagée, tandis que les conséquences, parfaitement
logiques, obéissent aux lois naturelles : Dutilleul, le
héros du Passe-muraille,
peut traverser les murs et la nouvelle est le récit
humoristique des conséquences de cet événement sur sa
vie de petit employé. Raoul Cérusier, dans La Belle
Image (1941), découvre en fournissant des photos
d'identité qu'il a changé de visage et qu'il est devenu
beau : l'histoire est celle des conséquences logiques de
ce changement sur sa vie professionnelle et affective.
Le nain du cirque Barnaboum grandit en une nuit (Le
Nain, 1934) : le phénomène n'est ni expliqué ni
décrit, mais l'histoire des conséquences de cette perte
d'identité obéit aux lois physiques et psychologiques.
Marcel Aymé ne se limite pourtant pas à une recette du
fantastique : l'écrivain Martin (Derrière
chez Martin, 1938), qui
cède trop souvent à la nécessité de faire mourir ses
personnages prématurément, après avoir été morigéné par
son éditeur, reçoit la visite de l'un d'entre eux, qui
réclame contre le mauvais traitement que l'auteur lui
fait subir. La suite de l'histoire se fonde sur les
interactions entre le monde réel et celui du roman où
Martin occupe la place de Dieu. Le fantastique
s'enrichit de cet échange entre le déterminisme du réel
et l'omnipotence de l’écrivain. Dans Le
Cocu nombreux, du même
recueil, un vagabond découvre tout un village peuplé
d'êtres humains dotés de deux corps (sauf les fous !),
et l'on mentionne d'autres villages « où
une même personne habite quatre, dix, vingt corps et
davantage… ».
Le langage de Marcel Aymé :
Marcel Aymé a l'art de mettre en scène toutes les classes sociales avec le
langage qui leur est propre. Bourgeois, snobs,
parisiens, voyous, intellectuels (Travelingue),
paysans (Marthe et Hyacinthe Jouquier dans Gustalin,
Arsène Muselier dans La
Vouivre), universitaires
(l'oncle Jouquier dans Gustalin), politiques et
militants (Gaigneux et Jourdan dans Uranus)
tous sont restitués avec authenticité dans leur milieu
selon leur parler. Évidemment, compte tenu de ses
origines franc-comtoises,
l'écrivain fait une place de choix au parler franc-comtois essentiellement
dans La
Table aux crevés, La
Vouivre, Gustalin et Brûlebois.